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INTERVIEW TETU, Ph. Clauzard

Projets de formation

dimanche 18 août 2013, par philzard

Question 1 : La Thématique homo doit-elle être inclue dans la formation au métier d’enseignant ? Si oui , comment ?

- Si des circulaires ministérielles ont posé les jalons d’une possible ouverture de l’enseignement sur la thématique homosexuelle, tout reste à construire, en commençant par une formation des enseignants adaptée. C’est, me semble t-il, la première chose à faire. Il convient de sensibiliser les enseignants à la thématique de l’homophobie et de l’homosexualité. Il faut les aider à intervenir en classe sur ces questions. La thématique homo doit être absolument inclue dans la formation au métier d’enseignant. Les associations homosexuelles ainsi que les personnes engagées dans le mouvement gay et lesbien peuvent apporter une aide précieuse à la mise en place de modules de formation dans tous les IUFM (Institut Universitaire de Formation des Maîtres du premier et second degré). Qu’il s’agisse de la formation initiale des professeurs mais aussi de la formation continue. Il conviendrait aussi qu’une demi-journée d’animation pédagogique par an ( le mercredi ou le samedi) soit banalisée pour une sensibilisation sur le sujet comme cela se fait concernant la violence scolaire, la maltraitance, etc...

Je vois une formation axée sur trois principes :

- une formation « théorique » avec conférences, exposés, explications, films avec des experts débouchant sur des discussions pour développer des démarches pédagogiques pertinentes selon les disciplines et les niveaux d’enseignement.
- une formation pratique, voire « tripale » avec des études de cas et surtout des « jeux de rôle » ou de mises en situation sur ce que vivent les homosexuels victimes de préjugés, d’ostracisme, de discriminations ou de violences verbales et physiques. Il s’agit que l’enseignant lambda ressente réellement la grande injustice et la souffrance, le déni d’existence qu’il peut résulter de certaines situations pénibles pour les gays et les lesbiennes et se trouve ainsi motivé pour aborder le sujet et en parallèle bouscule ses propres représentations et préjugés, mette « au clair » ses valeurs personnelles, professionnelles et éducatives face à l’homosexualité. Un vrai travail de fond.
- une formation « rencontre » avec des associations homosexuelles, des gays et des lesbiennes venant témoigner de leurs expériences, de leurs vécus et qui démystifie l’homosexualité, les homosexuels, les modes de vie des gays et des lesbiennes. Je crois que ces formations peuvent apparaître si les conseils d’administration des IUFM ou les Inspecteurs d’Académie et les Recteurs les impulsent vraiment. Il y aurait là un vrai travail de lobbying à effectuer... parce que les dernières circulaires ministérielles l’autorisent et attendent une application sur le terrain...

Question 2 : Êtes vous favorables à la venue d’associations homo et/ou de prévention en cours ? Comment cela doit-il être organisé (en cours, ou dans une "journée spéciale", ou autre...) ?

- Je ne vois pas d’inconvénient à la venue de représentants d’associations homo. Celles-ci peuvent jouer un évident rôle de ressource pour les enseignants. Il me semble utile que les visites faites en cours soient préparées en amont par le prof et soient finalisées par un travail significatif. On pourrait imaginer que les lycées ou les collèges organisent aussi des conférences ou débats-films sur la thématique dans le cadre de la semaine contre le racisme au mois de mars, voire en juin lorsque tous les médias évoquent les gay-pride et que les jeunes s’interrogent sur la question. D’autres activités hors classe comme des expositions par exemple de photos de familles homoparentales ont l’avantage de toucher davantage d’élèves et de les amener à poser aux profs des questions ou à choisir ( comme certains le font déjà) des sujets en lien avec l’homophobie/homosexualité dans le cadre des nouveaux Travaux Personnels Encadrés. Il s’avère que certains lycéens « font entrer » actuellement la thématique dans les cours. Le problème est d’arriver à convaincre les chefs d’établissement qui autorisent ou non des intervenants extérieurs. Là encore un travail de « pression » avec par exemple la campagne d’origine américaine « Retour à l’école, Back to school » est nécessaire...

Question 3 : Faut il agir au niveau des programmes ?

- L’école est le lieu où se créent les savoirs. Les questions liées à l’homosexualité en sont exemptes par je ne sais quelle magie ou homophobie institutionnelle ou « académique ». Le silence de l’école sur l’homosexualité, c’est dire son illégitimité et c’est tronquer la réalité de notre société contemporaine faite de couples homos, de familles homoparentales et d’individus désirant des personnes de même sexe. Agir sur les programmes scolaires est un formidable levier pour faire évoluer dès le premier âge et tout au long de la scolarité les mentalités et accompagner celles et ceux qui sont concernés et sauront ainsi très tôt que leurs attirances sont valides. C’est la possibilité de donner un visage positif à l’homosexualité, y faire réfléchir... en abordant la thématique là où elle est en creux, là où elle est passée sous silence en histoire, en littérature, en éducation à la citoyenneté, en éducation à la sexualité . Dans d’autres matières, un petit travail sémantique tout simple comme changer les prénoms de protagonistes dans les situations-problèmes en maths ou physique ( David et Mohammed ou Nathalie et Vanessa à la place de David et Vanessa) bouscule la vision « hétérocentrée » de notre monde...

Question 4 : - Qu’attendez vous de Luc Ferry, le nouveau ministre de l’Education nationale ?

- En tant que philosophe, monsieur Ferry sait que le monde n’est pas univoque et que sa diversité est une richesse..., aussi, attends-je qu’il réaffirme les positions prises par ses prédécesseurs Ségolène Royal et Jack Lang et qu’il garantisse dans le cadre de la campagne du « respect à l’école » que le respect des homosexuel-le-s et de l’homosexualité est une priorité nationale. Puis dans un second temps qu’il donne les moyens d’application des directives dans les établissements scolaires et amplifie la dynamique engagée par le ministère :
- incitation à l’acquisition de livres « lgbt » dans les bibliothèques des écoles et à la création de groupes de « jeunes en questionnement » sur leur sexualité dans les lycées,
- développement d’études homosexuelles à l’université susceptibles d’alimenter les démarches des pédagogues,
- mise en place d’un comité de réflexion et de pilotage pour l’inscription des questions homosexuelles dans les programmes scolaires et la formation des enseignants,
- agréments donnés à des associations homosexuelles pour des interventions dans les IUFM et dans des conférences organisées par les lycées... Post-Scriptum

Plus en détail, « Ce que peut faire l’école »  :

– Aborder les thèmes de l’homosexualité et de l’homophobie au même titre que d’autres thèmes de société (racisme, sexisme, familles, discriminations, amour, etc.) dans les cours d’enseignement, de manière appropriée de la maternelle à l’université...

– Inclure des représentations de l’homosexualité et de personnes homosexuelles dans les manuels et les programmes scolaires de l’école primaire au lycée (langues, littérature, science, histoire, philosophie)

– Développer des leçons ayant clairement pour thématique les questions d’homosexualité en éducation à la citoyenneté, en éducation à la sexualité et en éducation "culturelle"...

– Mettre à disposition des ressources concernant l’homosexualité dans les centres de documentation (livres, films, brochures, bibliographies thématiques, adresses de lieux ressources pour les jeunes- Ligne Azur, Centre Gai et Lesbien, Sida Info Service...)

– Favoriser un climat d’acceptation de toutes les différences et permettre aux élèves et aux professeurs homosexuel-le-s de vivre sans se cacher (création de club de rencontre entre jeunes gays et lesbiennes, et de groupe de parole pour les enseignants homosexuels dans chaque circonscription éducative ou groupement de collège/lycée...)

– Sensibiliser le personnel enseignant aux thématiques de l’homosexualité et de l’homophobie dans des modules de formation initiale et continue (IUFM) ; banaliser une demi-journée par an pour que les enseignants travaillent ensemble sur leurs valeurs personnelles, sociales et professionnelles suite à une projection d’un documentaire du type "It’s elementary".

– Informer et rassurer les parents d’élèves lors des réunions plénières de rentrée scolaire, inclure les parents d’élèves gais et lesbiennes ainsi que les parents homosexuels dans les échanges d’information.

Document joint :

Jeux de formation, proposition de formation sur l’homophobie

http://blog.edurespect.info/Jeux_de...

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